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Loi "République numérique": la mauvaise surprise pour Airbnb

  /   par David Frade

La République numérique a été proclamée au Sénat ! Après l’adoption par les députés le 26 janvier 2016, les sénateurs ont adopté à leur tour la nouvelle loi sur le numérique, le 3 mai dernier. La secrétaire d’Etat chargé du numérique, Axelle LeMaire, avait rendu la construction de ce projet de loi historique, puisqu’elle avait été soumis à une consultation citoyenne en ligne avant d’être présentée à l’Assemblée Nationale. Néanmoins, deux amendements majeurs sont venus s’ajouter au texte, risquant ainsi de compliquer la vie des utilisateurs de la plateforme Airbnb. Le sénateur socialiste du Val de Marne, Luc Carvounas, à l’origine de ces amendements, cède ainsi aux nombreuses invectives d’Anne Hidalgo qui se bat depuis plusieurs mois pour une réglementation plus ferme des locations de logements entre particuliers.

 

Grande première dans l’histoire de la politique française, le texte de loi sur le numérique, nommé humblement “République Numérique” par le gouvernement socialiste, a été soumis pendant un peu moins d’un mois à une consultation citoyenne en ligne. Du 26 septembre au 18 octobre 2015, les internautes pouvaient ainsi réagir et contribuer à l’élaboration de ce texte, présenté en première instance à l’Assemblée Nationale le 9 décembre 2015. Après son adoption par les deux chambres, c’est désormais une commission paritaire mixte qui devra présenter une synthèse au Palais Bourbon afin de faire voter le nouveau texte avant la fin du mois de juin. Ce projet de loi, porté par le secrétaire d’Etat chargé du numérique, Axelle LeMaire, devait mettre à jour la législation française face au développement foudroyant des nouvelles technologies et des alternatives au système économique classique qui en ont découlé.

Initialement, ce projet de loi devait mieux protéger les internautes face au big data et mettre à disposition du public les données des administrations publiques. Après avoir reçu le rapport de Pascal Terrasse en février 2016 sur l’économie collaborative, le gouvernement avait pris soin d’inclure dans son texte “République numérique”, plusieurs propositions du député de l’Ardèche exigeant de ces plateformes des informations tarifaires et contractuelles claires ainsi qu’une obligation de publier les avis des utilisateurs en ligne. Ces résolutions, bien accueillies à la fois par les acteurs du marché, par les consommateurs et les élus, ne sont toutefois pas les seuls changements qui pourrait affecter l’économie collaborative si le texte était promulgué en l’état. 

 

Deux amendements qui raviront la Maire de Paris

Soutenu dans les médias par la maire de Paris, Anne Hidalgo (source Boursorama.com), le sénateur socialiste Luc Carvounas a soumis deux amendements, adoptés à main levée, autrement plus contraignants pour l’un des acteurs les plus importants du marché de l’économie collaborative, AirBnb. L’utilisation de la plateforme de location de logements entre particuliers pourrait devenir autrement plus compliquée pour les habitants d’agglomérations de plus de 200 000 habitants. En effet, les utilisateurs désireux de louer leur appartement devront désormais s’enregistrer auprès de leur Mairie afin d’obtenir un numéro d’enregistrement obligatoire, si la collectivité territoriale en émet le souhait par décret. Une démarche donc plus compliquée pour les “hôtes” qui n’ont besoin actuellement d’aucun justificatif de l’administration publique pour mettre en ligne une annonce. 

Mais le zèle du sénateur du Val-de-Marne ne s’est pas arrêté là. Autre alinéa dont pourrait souffrir AirBnb, la taxation des revenus venant de la location de logement par un particulier. Toute personne percevant une somme égale ou supérieur à 5000 euros par an en louant sa résidence principale serait soumis à l’impôt et aux cotisations sociales sur ses gains. Une mesure qui viendrait s’ajouter à la limite des 120 jours de location par an, déjà active et qui devrait être renforcé par une obligation des plateformes de bloquer les annonces qui ont dépassé cette limite.


Ce qui changerait avec la loi sur le numérique pour les utilisateurs de Airbnb:

  • - L’enregistrement en Mairie afin d’obtenir un numéro de loueur pour les villes de plus de 200 000 habitants qui ont rendu cette démarche obligatoire.
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  • - Le paiement d’impôts sur le revenu et de prélèvement sociaux sur les revenus de plus de 5000 euros par an générés sur la plateforme. 


Un nouveau chapitre de la bataille contre Airbnb


Ces amendements, auxquels devrait s’opposer le gouvernement, pourraient être symboles d’une première victoire pour la ville de Paris face aux plateformes de location de logements entre particulier à but touristique, s’ils étaient adoptés. La mairie a d’ailleurs affiché publiquement son soutien en anticipant la promulgation. Le 10 mai dernier, la municipalité de la capitale à mis en ligne sur opendata.paris.fr la liste des 126 propriétaires parisiens qui ont déboursé plusieurs milliers d’euros afin de pouvoir louer toute l’année leur logement à des touristes en toute légalité. Accusée d’encourager la délation de ces voisins, la ville de Paris a déclaré vouloir provoquer “un choc de conscience” (source Europe 1) et espère ainsi une vague massive de mise au norme des logements loués toute l’année à des touristes. 
La réaction du géant californien Airbnb ne s’est pas fait attendre. Quelques heures seulement après l’annonce de l’adoption au Sénat du texte, la plateforme qui propose environ 200 000 logements en France pour un chiffres d’affaires annuel de 5 millions d’euros  (source société.com), a mis en ligne une pétition afin de protester contre ces mesures. Nous sommes désormais bien loin des poignées de main chaleureuses échangées entre Bruno Julliard, adjoint au maire de Paris et Brian Chesky, cofondateur de Airbnb,, le 26 février 2015....

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