Egalité et Citoyenneté: un projet de loi résolument collaboratif

Egalité et Citoyenneté: un projet de loi résolument collaboratif

  /   par David Frade

Déjà utilisée pour le projet de loi “République numérique”, le gouvernement a soumis pour la deuxième fois de l’histoire politique française un texte à la contribution citoyenne en ligne. Pendant que des milliers de jeunes continuent de se réunir chaque soir place de République à Paris pour, entre autres, demander un régime plus participatif, le gouvernement socialiste tend la main, au travers de cette initiative, vers cette partie de son électorat délaissé. Censé relancer la participation citoyenne dans la vie de la démocratie, il est en effet difficile de ne pas discerner une manoeuvre électorale pour 2017 dans ce texte, qui sera soumis fin juin aux Assemblées. 


“Quoi de mieux que cette plateforme pour initier le vivre ensemble ?” Tels ont été les propos enthousiastes d’Ericka Bareigts, la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité réelle, pour présenter la plateforme collaborative mise en place dans le cadre du projet de loi “Égalité et Citoyenneté”. Le 12 mai dernier, Emmanuel Cosse, ministre du logement et de l’habitat durable, Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, et Ericka Bareigts donc, étaient réunis pour annoncer officiellement la mise à contribution en ligne des citoyens sur ce texte, avant les discussions parlementaires à la fin du mois de juin. En moins d’un an, c’est la deuxième fois que le gouvernement intègre ce processus à la construction d’un projet de loi, avant le début de la navette parlementaire. Tentative de remobilisation des Français autour de la vie politique du pays, il est toutefois difficile de ne pas discerner dans cette initiative une stratégie électorale en vue des présidentielles de 2017. 

Une manoeuvre électorale

Quelque soit le scénario ou ses adversaires, François Hollande serait perdant aux prochaines présidentielles si la jeunesse était le seul électorat autorisé à voter. Une raison visiblement suffisante pour que le gouvernement reprenne la sémantique utilisée lors des rassemblements du mouvement “Nuit debout”. Véritable tentative de séduction auprès des jeunes, majoritaires dans les cortèges de manifestants anti-Loi El-Khomry, on constate dans cette présentation du projet de loi l’omniprésence de termes tels que “culture de l’engagement”, “égalité des citoyens”, “renforcement du rôle des citoyens”... Difficile de ne pas y voir l’écho fait aux revendications scandées chaque soir place de la République à Paris ! Un comportement que l’on pourrait qualifier de schizophrène de la part de l’Elysée qui, avant de leur tendre la main, a fait le choix de la répression policière pour faire taire les slogans scandés par les militants. 

Une inspiration des modèles d’économie participative

Si les intentions et les raisons restent discutables, il n’en est pas moins un progrès pour la démocratie et le rôle du citoyen. Ce nouveau modèle de construction de projet de loi, impliquant directement le citoyen dans l’étape de l’élaboration, n’est pas sans rappeler les principes même de l’économie collaborative. Plateforme en ligne, désintermédiation (dans le dialogue entre les représentants politiques et la population), contribution libre des internautes dans le but de produire un bien commun… Des termes qui rappellent à la définition même de ce nouveau modèle économique. Sans avoir de couleur politique, l’économie collaborative ne rendrait-elle pas notre démocratie plus participative ?

 

 

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